Section I : La condition :

Ce sont les articles 1168 à 1183 du Code Civil, le codificateur a consacré une large part de son temps à envisager cette modalité. Ici on considère que le code civil en fait trop mais qu'il ne donne pas de définition.
La condition est un événement futur et incertain qui soit suspend l'exécution d'un contrat (condition suspensive) ou provoque la disparition d'un contrat (condition résolutoire) : c'est ce que l'on retire de l'article 1168.
La condition est une modalité fréquente et importante. Ex : dans un contrat immobilier on insère
une clause suspensive telle que le contrat est suspendu à deux élément :
- l'obtention d'un permis de construire
- l'obtention d'un crédit pour le terrain et la construction de la maison.

La jurisprudence envisage deux temps dans la condition : les conditions et les effets.

I : Les conditions de " la condition " :

Il s'agit d'observer des conditions de validité de la condition, il y en a 4 :
- Une condition est valable si elle porte sur un événement possible, moral et licite :
o Possible : la condition impossible est celle qui repose sur un événement dont on sait au moment de la formation du contrat qu'elle est impossible. A l'impossible nul n'est tenu
o Immoralité ou illicéité : c'est l'article 6 du code civil et l'article 1172. Les conséquences sont redoutables : une obligation impossible immorale ou illicite éradique la condition et la convention qui la comprend (article 1172 du Code Civil). En matière d'actes à titre gratuit c'est l'article 900 du Code Civil (libéralités, donations…) seule l'obligation impossible, immorale ou illicite est nulle l'acte demeure. L'article 900 avait pour objectif en 1804 que l'on ne puisse pas retrouver par le biais des successions des mécanismes d'avant la révolution (droit d'aînesse …). La justification de l'article 900 disparaît d'où une évolution dans les actes à titre gratuit. On cherche si la condition est une cause impulsive et déterminante de l'acte :
§ Si ce n'en est pas une alors l'acte demeure et pas la condition.
§ Si cela en est une tout l'acte est nul.
Cette distinction de la cause impulsive et déterminante a été portée à l'article 1172. Le mélange entre les articles 900 et 1172 a mené à une solution médiane.

- Il faut que l'événement soit un événement futur. Aucune difficulté : il convient que l'événement ne soit pas encore réalisé, si l'événement est déjà réalisé il ne peut plus faire l'objet d'une condition.

- Il doit s'agir d'un événement incertain la condition présente un caractère aléatoire, la survenance dépend du hasard. Si on prend comme événement la mort d'une personne : c'est certain en ce que cela finit toujours par arriver mais la date est incertaine ; ici ce n'est pas une condition c'est un terme incertain.

- Il convient que l'événement échappe à la volonté des parties. Cette question est posée par l'article 1170 du Code Civil qui a justifié une jurisprudence abondante. On se méfie des conditions potestatives qui dépendent de la volonté des parties et en principe ces conditions sont nulles, cette exigence est apparue extrêmement lourde d'où des distinctions.
o Les conditions casuelles (art 1169 du Code Civil) : elle dépendent totalement du hasard ou échappent totalement à la volonté des parties
o Les conditions simplement potestatives : ce sont des conditions qui dépendent pour partie du hasard et pour partie de la volonté du contractant.
o Les conditions purement potestatives : elles sont nulles.

La jurisprudence a cherché à limiter l'application de l'article 1174 du Code Civil, la Cour de
Cassation considère que les conditions purement potestatives qui dépendent de la volonté du créancier de l'obligation conditionnelle sont valables. Seules les conditions purement potestatives du côté de celui qui s'oblige sont nulles. La Cour de Cassation considère que seules les conditions potestatives suspensives sont annulables, les résolutoires sont valables (ex : j'achète cette machine si mon conseil d'administration est d'accord, or le conseil d'administration c'est moi : cela est nul). Le fait qu'il y ait condition résolutoire on transforme en faculté de dédit qui est valable.

Toutes ces distinctions sont subtiles : Ex : je vends ceci si mon acheteur me vends cela en retour. C'est une condition simplement potestative.
Tout le jeu est de rechercher si telle ou telle condition dépend pour l'essentiel de la volonté de l'une des parties dans la mesure où une telle condition permet de ne pas avoir à exécuter ses obligations sans en subir les conséquences, pour cette raison les conditions potestatives sont nulles si elles viennent de celui qui s'oblige : L'obligation conditionnelle dans son entier est annulée.

II : Les effets de la condition :

Il y a trois phases dans le mécanisme conditionnel : avant, pendant et après.

Paragraphe I : Avant la réalisation des conditions :

Un contrat est conclu il a certaines obligations avec des conditions (suspensives, résolutoires…) dans les deux cas on est dans une période " pendante conditione "

I) Les conditions suspensives :

Ex : Prenons un contrat de vente avec condition suspensive : l'obtention d'un prêt. Pendant la durée de la condition suspensive le contrat de vente demeure, la réalisation du contrat de prêt met fin à la condition suspensive.
Pendant la durée de la condition suspensive l'obligation conditionnelle n'est pas et ne peut pas être exécutée. Que se passe-t-il ? L'acheteur conditionnel a un germe de droit qui lui permet de réaliser un certain nombre d'actes :
- Mesures conservatoires.
- Le créancier et le débiteur sont engagés ils ne peuvent pas se rétracter.

II) Les conditions résolutoires :

Si à l'inverse la condition est résolutoire (ex : je vends ma maison sous la condition résolutoire d'avoir un enfant sous un an). Pendant l'exécution de cette condition tout se passe comme s'il n'y avait pas de condition sauf que le vendeur a un germe de droit au retour donc il peut prendre des sûretés…

Paragraphe II : Au moment de la réalisation :

Ce qu'on appelle le moment de réalisation de la condition correspond à la survenance de l'événement sur lequel repose la condition. En pratique les conditions sont assorties d'un terme.
Ex : j'achète un terrain sous la condition suspensive d'obtenir un permis de construire sous 3 mois, après ce délai la condition sera réputée défaillie, c'est ce qui menace le contrat en cas de non survenance de la condition.
Le comportement des parties est très important car l'article 1175 du Code Civil considère que pour l'appréciation de la survenance de la condition il faut regarder le contrat pour voir dans quelles conditions les parties étaient.
Ex :
- Je conclus un contrat d'achat sous la condition d'obtention d'un prêt sous 3 mois.
- Je conclus un contrat d'achat sous la condition d'obtention d'un prêt sur 15 ans et un montant maximal de remboursement par mois d'une certaine somme.

Dans les deux cas la condition est la même : obtenir un prêt ; mais les conditions de la condition
sont différentes (dans le deuxième cas c'est beaucoup plus précis). Lorsque la condition est réalisée le contrat pourra être exécuté. Lorsque la condition est défaillie (non survenue) l'effet est la caducité de l'obligation conditionnelle. Les conditions de la condition ont des effets très importantes. La caducité de l'obligation pose 3 difficultés.
- L'article 1178 du Code Civil dispose que si une condition est défaillie à cause d'une faute du débiteur de l'obligation conditionnelle, la condition est réputée accomplie (c'est une sanction de la faute). C'est redoutable, en situation du droit du crédit on rencontre cela souvent. Ex : dans les cas précédents (la condition est l'obtention d'un prêt), le débiteur de l'obligation qui ne voudrait plus pour une raison ou une autre acheter peut faire exprès de ne pas obtenir le prêt pour ne plus être obligé d'acheter. Le vendeur devra prouver que le débiteur a empêché l'accomplissement. La preuve est difficile. La jurisprudence se fonde sur l'identification d'un devoir de loyauté. L'article 1178 en est une illustration, on vérifie que le débiteur a été loyal. Ex : alors que les conditions du prêt étaient très précises, l'emprunteur était allé chercher un prêt auprès d'un banquier fantaisiste, la Cour de Cassation dit qu'il aurait fallu demander à des banques sérieuses, il y a eu exécution de mauvaise foi.

- Les parties n'ont pas prévu de délai pour l'accomplissement de la condition, qu'en conclure ?
o Doit on en conclure que la durée est illimitée ? Les articles 1176 et 1177 considèrent que la condition sera réputée défaillie lorsqu'il est certain que l'événement attendu ne se produira pas. La jurisprudence est partagée sur l'application de ces textes. Peut-on admettre que le créancier et le débiteur souhaite attendre une durée raisonnable avant défaillance de l'obligation Civ 1ère 3/02/1980. Cette solution n'a rien de certains, d'autres décisions de la Cour de Cassation admettent que l'obligation soit illimitée Civ 3ème 24/06/1998.
- On admet que celui qui bénéficie d'une condition peut y renoncer. Dans ce cas la renonciation vaut réalisation de cette condition et l'obligation conditionnelle devient exigible.

Paragraphe III : Après la réalisation de la condition :

Le principal effet de la condition réalisée est d'être rétroactif, l'obligation est considérée comme ayant toujours existée et rétroagi jusqu'au jour de la conclusion du contrat. Cela pose trois difficultés :

I) La rétroactivité de la condition suspensive :

Cette rétroactivité signifie que l'on va considérer que l'acheteur est propriétaire depuis le jour de la conclusion du contrat, cela permet de valider une série d'actes qui ont pu être réalisé avant la condition suspensive (paiement d'une parte du prix qui sera rétroactivement consolidée).

II) La rétroactivité de la condition résolutoire :

On achète sous la condition résolutoire que tel événement se produise, si l'événement se produit le contrat disparaît rétroactivement, on considère que l'acheteur ne l'a jamais été et le vendeur a toujours été propriétaire. Tous les droits des créanciers et les actes des acheteurs sont anéantis.

III) Limites à cette rétroactivité :

La rétroactivité est une fiction, on fait comme si le contrat n'avait jamais existé, cette rétroactivité est supplétive, les parties peuvent y renoncer donc la survenance de l'événement n'emporte pas rétroactivité.

1) Le problème de la perte de la chose :

Qui la supporte ? J'achète une maison sous condition suspensive, la maison brûle et j'obtiens le
prêt. La perte de la chose entraînera caducité du contrat, c'est le vendeur qui supporte il devait s'assurer. C'est pareil pour les conditions résolutoires, la rétroactivité n'a pas d'effet.

2) L'hypothèse des fruits d'une chose :

On vend une maison sous une condition suspensive qui met 1 an à se réaliser et pendant ce temps
la maison qui est louée rapporte des fruits au vendeur. L'acheteur ne prend pas les fruits, ils sont conservés par le vendeur sous condition suspensive