Problématiques constructivistes

Section 4 : La problématique autour de l'acteur

a) A la recherche de la compréhension de l'action

C'est le contre-pied de Bourdieu. On cherche à comprendre les interactions entre les acteurs. L'ancêtre commun à cette théorie est Max Weber.

1) La compréhension du sens chez Max Weber

La compréhension du sens est différente de l'explication de l'action. " On ne peut pas expliquer ce qu'a fait Jules César. Mais on peut le comprendre ". L'homme n'est pas un objet. Il donne du sens à ces actions, aux choses. Il faut retrouver le sens objectif. Weber est le contraire de Durkheim.

Weber ne veut pas être un psychologue. La compréhension est un moment du raisonnement qui amène à l'explication. Cela objective le monde social.
Max Weber crée la méthode idéale-typique. Avec " L'éthique protestante " et " L'esprit du capitalisme ", il fait une constation objective. A la fin du 19ème siècle, l'Allemagne a beaucoup de chefs d'entreprises qui sont protestants. Quel est l'explication ?
Il y a une influence de la religion. Weber fait un détour : " la construction d'un idéal-type " du protestant qui investit. On peut comprendre que le protestant est marqué par son éducation, la morale protestante. La foi est la base du salut. Luther parle du " beruf ". Le protestant doit travailler et accepter sa vocation.

Le travail est le lieu central de la religion protestante. C'est le salut. Alors que le catholique peut acheter sont paradis. Le protestant doit être sérieux, doit s'investir dans le travail et ne doit pas dépenser son argent pour du luxe. Il doit réinvestir. Le capitalisme est naît.
Benjamin Franklin disait que le temps, c'est de l'argent. C'est la naissance du puritanisme protestant. C'est une partie du sens de la compréhension de la pensée protestante.
" L'esprit du capitalisme ", un autre livre de Weber, cherche à saisir l'esprit de ce système économique et sociale. Le capitaliste achète de la force de travail grâce à laquelle il produit des résultats sous forme de marchandises qui lui permettent de dégager un profit.

Pour Marx, le profit, ce n'est pas le bénéfice mais la partie de la force du travail qu'il ne paie pas. Pour réussir, le capitaliste est " condamné " à réinvestir dans son industrie…pour survivre. Le capitalisme est fondé sur la prévision. Weber nous donne la deuxième partie de la réponse.
Le capitalisme est comme le protestantisme. La morale protestante prédispose ses individus à devenir de bons capitalistes. Les pays protestants sont le plus souvent capitaliste. Weber cherche à comprendre les
comportements des chefs d'entreprises. Il construit une sorte de type, un idéal-type du protestant et du capitaliste. L'idéal-type n'est pas une description mais une construction théorique qui rassemble des caractères, des qualités qui se retrouvent rarement rassembler chez un individus.

Weber a compris un phénomène de l'intérieur. Attention, une religion ne construit pas un système économique et social. Il existe des contres-exemples :
_ L'Ecosse, la Suisse sont des pays protestants et sont restés longtemps agraire
_ La France, l'Espagne sont des pays catholiques et pourtant capitalistes.
Weber tentait d'expliquer des phénomènes sociaux.

2) Les idéales-types dans le domaine politique

Dans " Economie et société " de Max Weber, il se pose une question : " qu'est ce qui différencie les formes d'exercices du pouvoir dans les différentes sociétés ". Weber va construire des idéales-types politiques.
L'élément de base est la légitimité. C'est la raison. L'homme organise leur société avec des règles non-naturelles. Elles font pression sur les individus et font l'objet d'une acceptation. C'est une force légitime. C'est la croyance que l'obligation est désirable, souhaitable, nécessaire.

Il faut trouver la légitimité qui structure les sociétés. Weber trouve trois idéales-types de la légitimité :
_ La légitimité traditionnelle
_ La légitimité rationnelle et légale
_ La légitimité charismatique
La légitimité traditionnelle fonctionne dans les sociétés anciennes. Elles sont fondées sur la tradition. La légitimité est la continuation des traditions ( langage, mœurs…). Cela est fréquent dans les groupes religieux.
Par exemple, l'Eglise a ajouté des obligations même quand celle-ci s'opposaient à la Bible. La tradition peut être discutable. Elle est l'objet de difficultés. Il peut y avoir une divergence dans l'interprétation de la tradition. La mythologie permet d'argumenter contre une autre vision.

Les forces de cette légitimité est de s'appuyer sur une continuité de comportements sur une longue période. Les faiblesses sont que un simple événement peut la renverser ( la monarchie absolu française a disparu avec la Révolution de 1789 ). La tradition est un réinterprétation du passé.
La légitimité rationnelle et légale est présente dans les sociétés modernes. Ces dernières ont abandonné la tradition. Les sociétés dépendent de la Raison, la légitimité, c'est la loi. L'Etat qui est une nouvelle forme qui veut que sa légitimité repose sur la rationalité. ( souveraineté du peuple ).
Rousseau affirmait la même chose dans son " contrat social ". Toutes les sociétés occidentales ont une légitimité rationnelle qui a entraînée la construction d'une bureaucratie ( gestion de la société ). La rationalité a entraîné le désenchantement du monde. Toutes les sociétés y sont atteintes.

La légitimité charismatique est une qualité, en grec. Elle repose sur les qualités premières des dirigeants ou du dirigeant. La dictature a besoin de la légitimité charismatique. Le dictateur a des qualités ( purement fabriquées ). Mussolini, Hitler étaient des " acteurs de théâtre ". La légitimité charismatique a ce que n'a pas la légitimité rationnelle. Ça entraîne les foules, la popularité de l'action politique, un dynamisme. Elle peut permettre de trouver une solution ( la nouvelle constitution de 1958 est liée à De Gaulle ).

Mais il y a des risques. Hitler prétendait être au-dessus des règles. Certains pensent que le charisme est dangereux pour la démocratie. Weber est favorable au charisme car, à l'époque, la République de Weimar s'embourbe dans la rationalité. Le résultat, Hitler est au pouvoir en 1933.
Ces trois idéales-types sont trois constructions méthodologiques. Ceux-ci permettent de comprendre un système réel. Le système français est rationnel et légal. L'idéale-type n'est pas un jugement de valeur. On cherche à comprendre les actions. La pensée de Weber est une référence.

b) Le retour de l'acteur, développement de la sociologie politique à partir des individus

Trois auteurs ont fait des travaux différents de Weber : Elias ( allemand ), Michel Crozier ( français ) et Raymond Boudon ( français ).

1) Norbert Elias et la civilisation des mœurs

Il a écrit dans les années 1930 à 1950. Il apparaît comme une ressource pour expliquer les comportements des acteurs. Pour lui, un système politique ou sociale ne peut fonctionner que si les individus intériorisent un certain nombre de normes permettant à ce système de fonctionner.
La psychologie des individus permet de comprendre comment il faut faire fonctionner certaines normes. Il prend l'exemple de la " dynamique de l'Occident ". Il s'intéresse à la particularité de l'Occident. Comment ça se fait et comment ça marche ? Il reconstruit ce qui s'est passé depuis longtemps ; il parle de la curarisation des guerriers. Il cherche en fait à comprendre pourquoi l'Etat est centralisé et possède une bureaucratie.

Il prend l'exemple de la France qui est typique. Les Francs ont donné le pouvoir aux guerriers. Ils étaient libres et égaux. Et c'est entre eux qu'ils élisaient un Roi. Peu à peu on est passé d'une monarchie élective à une monarchie héréditaire. Comment on est passé à l'Etat ?
Il fallait que les guerriers laissent tomber l'égalité et la concurrence pour que le Roi soit tout puissant. Les rois de France vont éliminer les concurrents souvent par la diplomatie. Le mariage est important dans ce cas. L'objectif a été de créer une seule famille qui a le pouvoir.
Mais on a éliminé quantitativement les concurrents. Les gens, maintenant, doivent intérioriser la fin de l'espoir de faire concurrence aux Rois. Cela s'est obtenu avec la Cour.

La Cour était un lieu politique qui permettait l'apprentissage d'un mode de vivre qui fait passer les guerriers en courtisans. Par conséquent, la curarisation des guerriers se voit dans trois domaines :
_ D'un point de vue géographique, les guerriers ne vivent plus en Auvergne ( leur pouvoir ) mais à Versailles. Ils sont coupés de leurs bases.

_ D'un point de vue économique, les guerriers dépensent de l'argent et deviennent vite dépendant des subventions du Roi.
_ D'un point de vue sociologique, les guerriers deviennent des courtisans, ils sont devenus des étiquettes ( les normes qu'ils faillent suivre à la Cour ) et apprennent à discuter.
On a vu cela partout en Occident. Aujourd'hui, on transpose une violence par l'appareil de l'Etat. Les comportements appris sont devenus des comportements naturels. Ceux qui n'acceptent pas ces comportements deviennent des marginaux. La compréhension de l'intériorisation permet de comprendre le politique.

2) Michel Crozier, l'acteur et le système

Il est le représentant du retour de l'acteur dans la sociologie. Dans son livre " La sociologie bloquée ", il s'intéresse à l'administration française à travers ses caractéristiques. Ces dernières sont rigides. L'expérience napoléonienne ( résultat de la monarchie ) a hyper centralisé l'administration.
Tout se rapproche à Paris ( TGV ). On a une forte hiérarchisation en France ( commune, département, région, Etat ). L'aspect juridique est fort en France ; seule la révolution permet d'évoluer. L'administration française n'est pas prête aux réformes.
Elle a peur du face à face ( culture française ), peur de la responsabilité. Le modèle de Crozier est le modèle des Etats-Unis. L'aspect juridique est moindre comme la hiérarchie, la décentralisation. L'administration doit fonctionner comme une société privée, pour Michel Crozier.
Il faut renforcer l'acteur dans le système pour renforcer le système. Renforcer l'acteur c'est renforcer la culture. " On ne change pas la société par décrets " ( 1981 ).

3) Individualisme méthodologique de Raymond Boudon

Boudon écrit en 1979 " La logique du social ". Il refuse l'explication objectiviste qui a cette époque était un mode d'explication le plus courant. Peut-on aborder le fonctionnement d'un système social ? On ne peut l'aborder dans son ensemble. Mais en observant le rôle que jouent les acteurs dans la société, on peut le comprendre.
Les contraintes sociales sont un cadre dans lequel les individus inventent leur rôle. Il y a les mêmes règles de jeu mais avec des différences de facilités. Il se différencie de Durkheim et de Weber.

L'appartenance à une classe sociale n'est pas déterminante car on peut inventer des formes de comportements nouvelles ou innovantes. Les individus ont plusieurs possibilités.
Les individus utilisent leurs cadres de vie pour atteindre des objectifs. Il donne une explication stratégique du comportement des individus. Cela est très aléatoire et risque d'avoir des effets pervers.
Les individus calculent les effets qu'ils vont obtenir. Ils confortent une image que l'on a de l'acteur qui choisi son chemin. Boudon efface l'image de la contrainte sociale.

L'individualisme méthodologique n'explique pas cette transmission des inégalités. Il ne faut pas tomber dans une idéalisation de la société. L'acteur peut vouloir plusieurs choses selon le regard qu'on y porte. Pourquoi un retour depuis 20 ans de l'acteur dans l'explication de la société ?

En France, les traditions étatiques, la protection sociale font l'objet de contestations. L'Etat a une figure affaiblie ( décentralisation, Europe…). La protection sociale est déséquilibrée toujours plus. Il y a une remise ne cause de ce système. Les politiques libérales veulent une baisse de l'assistanat.

Il faut restaurer la responsabilité des individus. Derrière le débat scientifique ( Science sociale ) il y a un débat politique. La problématique de la science politique a différentes manières de poser la question pour expliquer le système social. La science politique est agitée par le questionnement scientifique. Le choix d'une problématique n'est jamais innocent, il est lié aux choix sociaux et politiques.